Zurich, 1904. Carl Jung, 29 ans, psychiatre, est au début de sa carrière et partage sa vie avec sa femme, Emma. S’inspirant des travaux de Sigmund Freud, Jung tente le traitement expérimental connu sous le nom de psychanalyse sur Sabina Spielrein, âgée de 18 ans. Sabina, jeune Russe cultivée qui parle l’allemand, a été diagnostiquée «hystérique», et a la réputation d’être agitée et violente. Lors de ses séances avec Jung, elle expose une jeunesse gâchée par les humiliations et une composante sexuelle sado-masochiste. Grâce à leur correspondance, Jung parvient à une grande complicité intellectuelle avec Freud, sur le cas de Sabina. Freud demande à Jung de traiter un collègue, Otto Gross, toxicomane et amoraliste impénitent. Sous son influence,
Jung va balayer sa propre éthique et se laisser aller à
son attirance envers Sabina. C’est le début d’une liaison
dangereuse dont les conséquences vont être aussi
inattendues que fondamentales.
Le nouveau film de D.Cronenberg ne manquera pas d’alimenter polémiques et impressions variées. Le scénario est dû à Christopher Hampton qui adapte sa propre pièce, dont le film garde une certaine théâtralité : lieux et espaces resserrés, nombreuses scènes d’intérieur, nombre restreint des personnages, omniprésence du dialogue, par ailleurs des plus brillants. C’est dire que le film surprend par une sagesse et un académisme auxquels le réalisateur canadien n’a guère habitué, et qu’une relative déception est légitime. Mais après tout, c’est bien le droit d’un créateur d’aller là où on ne l’attend pas forcément ! Ce retour vers les premiers temps de la psychanalyse a le mérite de faire vaciller de leur piédestal les idoles que sont devenus aujourd’hui Freud et Jung .Ce qui fera peut-être grincer les adorateurs des différentes chapelles de la psychanalyse , mais plaira aux profanes plus soucieux de la vérité des hommes que d’une image surdimensionnée à la hauteur de leur ego. Car c’est à une formidable bataille d’idées et d’égos que nous assistons. Michael Fassbender(Jung) et Viggo Mortensen(Freud)
se prêtent magnifiquement à l’intelligence mais aussi aux failles et aux petitesses de leurs personnages. Portraits surprenants et tout en contrastes. Celui d’un disciple étrangement féru d’ésotérisme et d’occultisme, submergé par une passion amoureuse sadomasochiste avec une de ses patientes, au mépris de toute déontologie. Celui d’un maître prisonnier volontaire de son conformisme bourgeois et vite enclin à faire d’une pensée dissidente une pensée ennemie à ignorer par le mépris. Bref, deux êtres supérieurs qui n’en sont pas moins hommes, pour le meilleur souvent et pour le pire parfois. Le film de Cronenberg restera sans doute isolé dans sa filmographie. On peut l’apprécier comme tel, sans se départir de l’idée qu’un tel sujet aurait pu être traité avec plus d’audace.