NA PUTU (2010) Le choix de Luna

Grave et beau, ne le manquez pas. La jeune réalisatrice bosniaque avait déjà été distinguée à Berlin en 2006 pour son premier film « Sarajevo mon amour ». NA PUTU trouve lui aussi son substrat dans les traumatismes d’une guerre qui fit plus ou moins 100.000 Morts (dont la moitié de civils). Si la tragédie a d’abord martyrisé la communauté musulmane à laquelle appartiennent Luna et Amar, le film gagne une portée universelle par l’approche humaniste des ravages qu’elle exerce sur les enfants de cette barbarie si proche dans le temps et dans l’espace. Luna et Amar s’aiment mais il est bien difficile d’aimer lorsqu’on porte en soi tant de deuils (leurs parents sont morts assassinés) plus ou moins refoulés. Leur désir d’enfant leur permet un temps de surmonter les malentendus, pour en devenir progressivement le révélateur implacable. Chaque plan du visage de Luna traduit son étonnement devant l’évolution d’Amar, son incompréhension, son désarroi mais surtout sa détermination à rester libre et maître de sa vie. Beau portrait de femme en résistance instinctive contre les séductions d’un asservissement qui se présente comme une source d’apaisement. Plus fragile sans doute, Amar épouse sans trop de difficulté les prescriptions rigides d’une communauté de Wahhabites. Au cœur du récit cette incursion étonnante dans leur camp d’été, sur une île que l’on n’oserait qualifier de paradisiaque, où les familles se retrouvent hors du monde, dans la paix de la soumission. Comme un doux lavage de cerveau dans la beauté de la nature et des chants religieux qui montent dans la nuit vers le ciel. La réalisatrice se garde bien de juger et ne cherche pas à nourrir le spectateur d’un quelconque anti-islamisme. Si religion est une réponse à la douleur, Luna, elle, n’est pas disposée à en payer le prix .La vie n’est pas un péché, elle quittera Amar, il a quitté le monde des humains, elle ne veut plus un enfant de lui.