La vie d'un pensionnat de jeunes filles dans l'Etat de Virginie en 1864. Alors que la guerre civile fait rage, le pensionnat pour jeunes filles de Miss Martha Farnsworth reste totalement coupé du monde - jusqu'à ce qu'à proximité, soit découverte un soldat blessé que le pensionnat va héberger.
Sofia Coppola s’inspire largement du film de Don Siegel (1996) tout en donnant une autre perspective aux rapports entre les personnages. Alors que le soldat sudiste blessé, interprété par Clint Eastwood, s’imposait comme le personnage principal, ce sont les femmes restées dans ce pensionnat jusque-là épargné par la guerre, qui préoccupent la réalisatrice, l’homme (Colin Farrell) passant au second plan.
L’apparition d’un mâle dans ce gynécée, affaibli mais tellement viril, va semer le désordre et des pulsions de plus en plus difficiles à contrôler. A chacune ses fantasmes, ses désirs et ses inhibitions marqués par un puritanisme exacerbé, imposé par la directrice (Nicole Kidman très à l’aise dans sa rigidité). Et c’est ici que le film montre ses limites, les personnages sont plutôt stéréotypés. De cris hystériques en chuchotements, ils n’offrent aucune surprise. Chacune joue son rôle, souvent très bien d’ailleurs (excellente Kirsten Dunst au romanesque douloureux).
Le film a obtenu le Prix de la mise en scène au dernier Festival de Cannes. Mais on aimerait que l’atmosphère de ce huis clos dont on devine que le dénouement ne pourra être que tragique soit plus étouffante . On se prend à regretter les aspects sulfureux du film de Don Siegel, ici les images sont léchées, d’un esthétisme qui paraît parfois gratuits, les robes élégamment froufroutantes. Et la guerre ne se manifeste que par des canonnades lointaines et des fumées de feu d’artifices.
Sofia Coppola a choisi de faire disparaître les femmes noires, ce qui est bien sûr son droit de réalisatrice, mais elle diminue l’intensité des passions, gommant toute référence à l’esclavage alors que nous sommes encore en territoire sudiste. Le film est joli, ce qui, vu le sujet est tout de même paradoxal, agréable à regarder. Les actrices sont séduisantes, on aurait aimé leurs personnages un peu plus pervers. De quoi attendre gentiment la fin sans avoir guère eu l’occasion de s’émouvoir.
Jean-Pierre Sculier
Première « Les Proies » de Sofia Coppola 19.09.2017
Sofia Coppola signe l'adaptation et la réalisation d'un nouveau thriller à l'ambiance oppressante : Les Proies. Adaptation du roman éponyme de Thomas Cullinan, déjà porté au grand écran par Don Siegel en 1971 avec Clint Eastwood, Les Proies a valu à Sofia Coppola le prix de la mise en scène au dernier Festival de Cannes. Première à BOZAR le 19 septembre !
En pratique
Mardi 19.09.2017 - 20h Palais des Beaux-Arts – Salle M
« Les Proies » de Sofia Coppola (2017, France/USA, 94’) Avec Colin Farrell, Nicole Kidman, Kirsten Dunst, Elle Fanning, Oona Laurence, Angourie Rice, Emma Howard, Addison Riecke
Langue : anglais, sous-titres français et néerlandais